Par Georges SIOUFI

Avocat à la Cour – SRDB & Associés

Le 8 juillet dernier la Commission Européenne a présenté sa stratégie énergétique pour parvenir à une neutralité climatique en 2050. L’hydrogène est le principal élément de ce plan.

Un mois auparavant l’Allemagne avait annoncé investir 9 milliards d’Euros de son plan de relance dans le développement de l’hydrogène.

De son côté la France a annoncé le 8 septembre dernier son plan à 7 milliards d’euros pour « démocratiser » l’hydrogène.

Il ne fait plus aucun doute que l’hydrogène va, à terme remplacer le fuel des navires, le kérosène des avions et l’essence de nos voitures. Il reste à déterminer quel type d’hydrogène pourra bénéficier de ces différentes subventions.

S’il va sans dire que les électrolyseurs du futur ne devront plus être alimentés par des énergies carbonnées, il y a débat – essentiellement entre la France et l’Allemagne – pour déterminer si seul l’hydrogène « vert » produit exclusivement à partir des énergies renouvelables (principalement éolien et photovoltaïque) sera éligible aux différentes aides et subventions ou si l’hydrogène dit « jaune » produit grâce aux centrales nucléaires (françaises) pourra également y prétendre.

La présidence allemande du Conseil s’efforce actuellement de convaincre les États Membres de ne financer que la production d’hydrogène « vert » ce qui d’un point de vue écologique est louable.

Cependant, la production d’hydrogène est tellement gourmande en électricité, qu’il est peu probable que les énergies renouvelables suffisent à elles seules à combler les besoins des futurs électrolyseurs.

De son côté, la France, forte de ses centrales nucléaires, a tout intérêt à utiliser son énergie nucléaire qui la mettra en position de rentabiliser plus rapidement que d’autres la production d’hydrogène non carbonné.

De vrais choix stratégiques seront à faire par l’Union Européenne dans les semaines qui viennent. Probablement verrons-nous se profiler des subventions à géométrie variable selon qu’il s’agisse d’hydrogène « vert » ou « jaune ».

Les énergies fossiles perdront leur primauté et l’hydrogène sera commercialisé sur un marché dédié. Son cours sera scruté de près par les nouveaux intervenants sur ce marché comme aujourd’hui pour le cours du Brent. Des instruments de couverture à terme seront très vite mis en place par les banques et un marché « papier » de l’hydrogène devrait voir le jour.

Cette nouvelle industrie va devoir mobiliser des capitaux énormes. Elle verra émerger de nouveaux opérateurs et des regroupements industriels s’opèreront.

C’est ainsi que le groupe français GTT leader mondial de la fabrication de systèmes de confinement pour le stockage et le transport en mer de gaz naturel liquéfié a récemment annoncé avoir acquis Areva H2Gen, leader français de l’électrolyse PEM.

Les logisticiens en charge du stockage et du transport de l’hydrogène joueront un rôle central dans ce nouveau monde. Bref une véritable révolution au niveau mondial se prépare et il convient de s’y préparer.

Dans ce nouveau contexte, le coup de canif que la France s’apprête à faire dans les contrats d’achat d’électricité photovoltaïque conclus avant 2010 envoie un message contradictoire. Divers amendements proposés par le gouvernement dans le cadre du projet de Loi de Finance 2021 prévoient une modification des tarifs au motif que les rentabilités internes de ces contrats sont excessives.

Au-delà du fait qu’il n’est jamais de bon ton qu’un État remette en cause sa signature, c’est toute la filière photovoltaïque qui se trouve maltraitée à un moment crucial où la France doit pouvoir justement compter sur les acteurs de cette filière pour son plan hydrogène.

SRDB Avocats & Associés

16 novembre 2020